De multiples raisons poussent la France à privilégier un engagement réel en Afrique à commencer par l’importance et la richesse de ses ressources naturelles. Mais de nouvelles puissances comme la Russie, la Chine ou la Turquie ont saisi tout l’intérêt du continent et s’emploient à y développer leur influence.
La France est privilégiée en raison d’une proximité culturelle, linguistique et souvent familiale incontestable qui s’accompagne du rôle devenu historique des diasporas africaines dans l'Hexagone qui ne cessent de s’accroître avec l’immigration.
Quelles erreurs ont donc pu être commises pour assister à une telle montée de l’opposition à sa présence dans ses anciennes colonies ?
La situation actuelle devrait amener la France à un réexamen urgent et en profondeur de ses politiques et stratégies. Son image est tellement dégradée qu’elle est devenue, chose inimaginable dans le passé, le bouc émissaire en Afrique de l’Ouest.
C’est ainsi que des coups d’état sont intervenus récemment au Mali, en Guinée, au Burkina Faso au Niger et plus récemment - dans un autre contexte il faut le mentionner - au Gabon.
On assiste à un tsunami, un véritable renversement des équilibres que l’analyse objective aurait dû normalement permettre de prévoir.
Il aura fallu des décennies pour que les peuples africains prennent conscience de leur existence, de leur existence politique et de la nécessité de gagner une véritable souveraineté nationale et internationale avec une vraie maturité politique.
Les 25 voix africaines qui manquèrent à la résolution des Nations Unies sur l’Ukraine représentaient déjà un vrai et nouveau Bandung. Cet aspiration forte pour une nouvelle forme de non-alignement correspond aussi au rejet par les peuples de certains régimes profondément contestés par les populations.
Y voir la seule main de la Russie ou d’une autre puissance derrière ces événements serait trop facile. Ce ne serait pas réaliste même si des fenêtres d’influence s’ouvrent désormais pour ces nouveaux arrivants.
Il y a désormais une pulsion anti française évidente qui se nourrit d’une énorme frustration face à l'insécurité globale et humaine grandissante, une pauvreté endémique, l’absence de l’Etat notamment dans les services de santé, le chômage, la radicalisation des jeunes, une corruption gigantesque. Tout espoir, notamment chez les jeunes, a disparu, le tout s’accompagnant, ce qui n’est pas négligeable, de la transformation de l’Europe en forteresse inaccessible, malmenant les demandeurs de visas qui, de toute manière, sont refusés...
Aujourd’hui les sanctions notamment économiques visant à étouffer ces nouveaux régimes sont totalement irréalistes et contre-productives ! C’est un manque de vision total. Elles n’aboutissent qu’à un seul résultat : les jeter dans les bras de ceux…que certains ne voudraient justement pas voir s’installer en Afrique !
Dans cet univers devenu totalement imprévisible, la France est tout naturellement une cible car elle est en première ligne avec un déploiement militaire qui devient le prétexte à toutes les exaspérations populaires, un patronage trop visible de certains dirigeants et une diplomatie pro-consulaire qui l'expose exagérément.
L’armée française, déployée contre les terroristes au Sahel, a payé le prix douloureux de la vie d’une soixantaine de militaires, mais, depuis dix ans, les résultats engrangés ne sont pas venus à bout de la menace, l'insurrection s’étant étendue .
Les autorités françaises ont donc perdu la main.
Elles sont visiblement en position de subir péniblement les événements plutôt que les anticiper, n’ayant rien vu venir, ni les putsch de la Guinee, du Mali, du Burkina Faso et du Niger ni, aujourd’hui, celui du Gabon.
La France ne pourra retrouver sa place en Afrique qu’en imaginant une vraie politique à long terme qui soit une vraie diplomatie respectueuse des spécificités nationales et surtout, en s’y faisant plus discrète et plus européenne dans ses stratégies comme dans sa présence.