Jean-Pierre Eyraud a une vue imprenable sur le port de Marseille. Depuis la terrasse de sa maison du quartier de Mourepiane, dans le nord de la ville, il est aux premières loges pour assister au ballet incessant des navires. Les paquebots ont débarqué 1,6 million de touristes en 2017 dans la cité phocéenne, qui vise la place de premier port de croisière méditerranéen avec 2 millions de passagers en 2020.
Mais ces géants des mers crachent aussi d’immenses volutes de fumée sous les fenêtres des habitants de Mourepiane. Jean-Pierre Eyraud en est convaincu, ces panaches noirs ne sont pas étrangers à ses problèmes de santé. A 68 ans, il est en rémission après un lourd traitement d’un cancer des voies respiratoires. « Les cancers ont commencé à se répandre comme une épidémie dans le quartier, il y a cinq ans, au fur et à mesure de l’augmentation du trafic des croisières », explique-t-il de sa voix éraillée par les séances de radiothérapie. « Ma sœur cadette est morte, tout comme mon amie Hélène. Sa sœur Josette a un cancer du poumon. Dans notre association, Geneviève a exactement le même cancer que moi et notre ancienne présidente, Lucienne, est en chimiothérapie », énumère ce peintre qui milite à Cap au Nord.
Plus d’un tiers de la vingtaine de membres actifs de l’association souffrent d’un cancer, explique sa secrétaire, Michèle Rauzier. Tous habitent Mourepiane, « le nez au-dessus des bateaux ». A l’instar de Jean-Pierre Eyraud, ex-amateur de haute montagne et de plongée, « aucun n’a jamais fumé et tous avaient une bonne hygiène de vie », ajoute Michèle Rauzier.